Dimanche 26 janvier 2020, par Didier Béclard

Trois cartes blanches pour trois chorégraphes

Quoi de mieux à faire pour braver le froid d’un dimanche après-midi hivernal, si ce n’est de découvrir trois instantanés de danse issus d’un projet de création ou d’une œuvre accomplie de trois chorégraphes contemporains belges et suisse.

Ce dimanche, le 140 remet le couvert pour la troisième édition de « MicroDanse » et invite la suissesse Anna-Marija Adomaityté à rejoindre nos concitoyens Jonathan Schatz et Lara Barsacq. Les projets doivent respecter trois règles : la pièce ne peut excéder vingt minutes, les accessoires et décors ne sont permis que s’ils entrent dans une valise et le spectacle ne peut faire recours à plus de deux intervenants..

« Ida don’t cry me love » (extrait) est le deuxième spectacle, après « Lost in Ballets russes », que Lara Barsacq consacre à Ida Rubinstein, danseuse légendaire des Ballets russes et muse de Serge Diaghilev. En 1909, elle interprète la danse des sept voiles tirée de « Salomé », la pièce d’Oscar Wilde adaptée par Richard Strauss, qu’elle termine nue sur scène. Sa prestation fait sensation, suscite la désapprobation de sa famille pour laquelle le théâtre semble déjà une déchéance ainsi qu’une condamnation par l’église orthodoxe. Cet acte provocateur la fait entrer dans l’histoire de la danse mais aussi dans celle du féminisme. Autre « fait de gloire », Ida Rubinstein commandite, monte et se produit dans le « Boléro » de Maurice Ravel en 1928.
Sur scène, les interprètes célèbrent la beauté étrange et inhabituelle de cette artiste de légende, son énergie, sa gloire et son absence. Elles célèbrent également la magie des ballets russes et leur univers envoûtant. Le portrait de « cette riche femme juive trop contemporaine qui voulait chanter et danser en même temps » détaille également le parcours de celle qui fut un véritable phénomène d’émancipation féminine.

Petite ville de la préfecture de Gunma, dans le centre de l’île de Honshū, la plus grande du Japon, « Minakami » donne son nom au spectacle né de la rencontre entre le chorégraphe Jonathan Schatz, « Suite », une œuvre de l’artiste numérique Yannick Jacquet et le compositeur Thomas Vaquié. Plongée poétique,« Minakami » donne vie à une expérience immersive autour des états de l’eau, de l’hypnose, de la contemplation, des transformations, ils dessinent une ode sensorielle à la fluidité. Oscillation, mouvement, transe, cette pièce, fortement inspirée par la méditation Zen et les arts japonais, est une ode à la douceur et à la patience dont composition musicale profonde trouve son inspiration dans le Shō, instrument à vent traditionnel du pays du soleil levant.


Dans « Dream Line », Anna-Marija Adomaityté, ancienne élève de la Manufacture ​(Haute école des arts de la scène) à Lausanne dresse un portrait du corps de femmes au travail reposant le souvenir de son propre corps travaillant dans un fast-food, ainsi que sur les témoignages de femmes à Vilnius en Lituanie et Lausanne. Dans certains environnements de travail, des gestes, purement utilitaires, peuvent être répétés des heures durant à un rythme effréné. La chorégraphe étudie ici le pouvoir de l’esprit à accéder, par instant au gré du temps qui passe, à un étrange état de liberté, échappant ainsi au dispositif gestuel répétitif et oppressant qui lui est imposé.

« MicroDanse #3 » le dimanche 26 janvier à 17 heures au 140 à Bruxelles, 02/733.97. 08, www.le140.be. Cette soirée inédite sera également proposée le 6 février au Centre Wallonie Bruxelles à Paris.

Teaser : https://vimeo.com/374443395