Loin de Linden

Ixelles | Théâtre | Le Rideau

Dates
Du 2 au 17 février 2016
Horaires
Tableau des horaires
Rideau de Bruxelles
rue Goffart, 7 A 1050 Ixelles
Contact
http://www.rideaudebruxelles.be
contact@rideaudebruxelles.be
+32 2 737 16 00

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Loin de Linden

Le petit-fils questionne le silence qui a régné entre elles un hiver de 1960.

Avec tendresse, Veronika Mabardi puise dans son histoire intime et évoque la Belgique telle qu’elle était il y a deux générations : ses souvenirs de guerre, ses conflits linguistiques, ses anecdotes savoureuses et cocasses…

Véronique Dumont et Valérie Bauchau étincellent dans des compositions à la fois typées et ciselées.
La Libre Belgique

Une pièce à la dimension universelle.
Rue du Théâtre

Création le 30 juin 2014 au manège.mons - Centre Dramatique.
Coproduction Rideau de Bruxelles / manège.mons - Centre Dramatique / Atis Théâtre.
Le texte est édité chez Lansman Éditeur 2014.

ME 10.02 après spectacle
Débat du bout du bar avec Veronika Mabardi, l’équipe du spectacle,…

Distribution

Texte de Veronika Mabardi. Mise en scène de Giuseppe Lonobile. Avec Valérie Bauchau, Véronique Dumont et Giuseppe Lonobile.

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4 Messages

  • Loin de Linden

    Le 8 février 2016 à 13:23 par VincentD

    J’avais déjà vu cette pièce à Mons, il y a 2 ans et j’y suis retourné au Rideau.
    J’ai autant aimé que la première fois. C’est un petit bijou d’intelligence et de sensibilité. Je me demande comment une auteure non belge a été capable de transcrire aussi bien des relations aussi belgo-belge entre une flamande et une francophone appartenant à deux milieux totalement différents.
    Il faut dire que les 2 actrices sont exceptionnelles de sensibilité et de vérité.
    Donc, n’hésitez pas une seconde, courrez voir cette pièce magnifique.

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  • Loin de Linden

    Le 11 février 2016 à 15:06 par Domi

    Un spectacle sensible, émouvant, intelligent et percutant, qui nous confronte à ces deux parts de nous-mêmes que sont les grands-parents. La différence de classe, de langue... On ne peut rester indifférent par ce thème universel traité ici avec beaucoup de finesse par Veronika Mabardi. Et joué avec brio par les deux comédiennes, Valérie Bauchau et Véronique Dumont. Je le conseille très vivement, c’est tout simplement MAGNIFIQUE !

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  • Loin de Linden

    Le 23 août 2016 à 15:16 par juliette

    la vie comme elle va...cela pourrait être le titre de cette pièce , magnifiquement interprétée - sans chichis mais avec un ton de vérité constant..bravo - à voir et à méditer

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  • Loin de Linden

    Le 25 août 2016 à 14:11 par Ferre

    J’ai passé un moment magnifique avec un spectacle original dans sa mise en scène ... avec deux comédiennes magistrales (sans oublier l’excellent troisième larron ...) chacune dans son style diamétralement opposé à l’autre ...
    Bizarrement le seul titre de cette pièce ne m’inspirait pas trop mais quel délice de l’avoir vue ...
    Chaudement recommandé ! Et encore BRAVO à "Bruxellons" ... :-))

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Lundi 8 février 2016, par Jean Campion

Une barrière infranchissable

Pressentant la mort prochaine de sa grand-mère Eugénie, Veronika Mabardi l’a enregistrée pendant des heures, "sans savoir exactement ce qu’il fallait lui demander", mais avec "l’intuition qu’il y avait quelque chose à comprendre dans la parole de cette vieille femme aimante" qui estimait avoir eu une "belle vie". Sur ces cassettes, aucune trace de l’unique rencontre avec l’autre grand-mère, Marie-Claire. Elles n’ont fait que se croiser et chacune refusait de parler de l’autre. Interpellée par ce mutisme, Veronika a donné la parole à Marie-Claire, pour tenter d’identifier la violente vérité, dont toutes deux cherchaient à la protéger. En écoutant ces deux femmes transmettre leur expérience du monde, elle a éprouvé la nécessité de les convoquer dans la même pièce. Pour qu’elles se parlent enfin ! Les aïeules sont devenues des personnages et l’auteure a pris la place du silence, "ce fameux silence qu’il y a toujours eu entre elles".

Incarnant le petit-fils, Giuseppe Lonobile (le metteur en scène) guide les comédiennes vers la cuisine. C’est le domaine de "Nie". Clairette par contre circulera sur le plateau, sa valise à la main. D’abord un peu réticentes, les grands-mères réchauffent leurs souvenirs, dans des monologues croisés, témoignages du fossé qui les sépare. La famille du garde-chasse de Linden est modeste mais chaleureuse. "Nie" s’amuse bien avec ses six frères et sœurs. Et quand à seize ans, elle est placée comme bonne dans une famille de Louvain, elle a le cafard. Mais contrairement à sa sœur aînée, elle s’accroche à cet emploi qui l’oblige à apprendre le français. Fille du général De Witte, Clairette assume son statut de bourgeoise francophone, sans en être dupe. Elle raille l’éducation de sa sœur "préparée" pour un beau mariage ou le bal du roi. Une mondanité ennuyeuse. Elle tenait cependant à y participer. La chevalière de son père est un souvenir, dont elle ne se sépare pas. Pourtant ses sentiments à son égard sont ambivalents. Elle admire sa conduite héroïque en 1914, savoure son anticléricalisme, mais se rebiffe contre l’hypocrisie de ce coureur de jupons.

A la suite du krach de 29, la famille De Witte est ruinée. Clairette part en Egypte, où elle est engagée au pair dans une famille. Pas de rémunération, l’honneur est sauf ! Le goût de la découverte et l’attrait des voyages joueront un rôle décisif dans sa vie sentimentale. Eugénie n’a pratiquement pas quitté sa campagne natale. Même pendant la guerre 40 passée au château de Linden. C’est là qu’elle a épousé "Phile", un adjudant bloqué dans son avancement par ses origines prolétariennes. Quand le futur mariage de leurs enfants obligera Eugénie et Clairette à se concerter, l’ambiance sera glaciale. Une seule rencontre, plombée par les préjugés de classe.

En orchestrant ce va-et-vient entre passé et présent, tension et lâcher-prise, le petit-fils empêche ses grands-mères de s’égarer. Pour ces personnages, le public devient progressivement un partenaire. Très spontanée, "Nie" remercie l’éclairagiste, fait circuler sa photo de mariage dans la salle. Véronique Dumont exprime avec justesse la rusticité de cette femme, qui a le cœur sur la main. Ses mimiques, ses clignements d’yeux, ses coq-à-l’âne et sa verve intarissable la rendent émouvante et drôle. Le jeu nuancé de Valérie Bauchau souligne la lucidité de Clairette. Issue du beau monde, cette femme élégante en reconnaît les défauts : froideur des rapports familiaux, poids des conventions. Mais fidèle à sa naissance et à son éducation, elle ne peut s’empêcher de regarder avec condescendance les "non civilisés" : "Tu hérites d’un regard et après tu te débrouilles toute ta vie avec."

A partir de témoignages qui la touchent personnellement, Veronika Mabardi a écrit une pièce sensible, pétrie d’humanisme, qui nous interroge sur nos rapports sociaux. Sans pathos ni leçon de morale. Prisonnières de leur milieu, qui les a enfermées dans des modes de vie inconciliables, Eugénie et Clairette ne se sont jamais parlé, mais ont entendu le vécu de l’autre : "un lien lucide peut être tissé". (V. Mabardi).

Jean Campion

Le Rideau