Final cut de et par Myriam Saduis

Beauvechain | Théâtre | Théâtre des 4 Mains.

Dates
Vendredi 27 mars 2020
Horaires
Tableau des horaires
Théâtre des 4 Mains.
rue Longue, 103 1320 Beauvechain
Contact
http://www.4mains.be
infos@4mains.be
+32 10 86 07 31

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Final cut de et par Myriam Saduis

Le spectacle est construit autour de l’histoire familiale de Myriam Saduis. Le mot spectacle ne convient pas tout à fait, plutôt le témoignage, d’une enfant née d’un couple fou d’amour entre une mère merveilleuse et paranoïaque et un père qu’elle n’a jamais connu, rayé de la carte par sa mère, jusqu’à son nom Saâdaoui, qu’elle refusait que sa fille porte au point de lui en fabriquer un autre…

Les membres de sa famille grand-maternelle italienne, colons en Tunisie durant le protectorat français, buvaient comme l’eau fraîche le racisme insu et ordinaire du colonisateur : l’amour de sa mère pour Bechir Saâdaoui fut vécu comme une transgression insupportable.

Avec une puissance et une présence hors du commun, la comédienne Myriam Saduis raconte son déchirement entre deux cultures, l’emprise maternelle délirante labourée par un mouvement perpétuel d’effacement de toutes les traces d’origine bâtarde du père déchu, dont l’Histoire fracassa l’amour.

Comment tirer un trait sur un passé ? Mettre un terme à une histoire ? « Final cut » distille la sobre ivresse d’une compréhension rétrospective dans un solo impressionnant, au bord du gouffre.

La presse
Mise en scène dépouillée, prestation hypnotique. On comprend qu’il ait fallu à l’auteure et metteuse en scène 12 ans de psychanalyse pour affronter cette histoire douloureuse, et reconstruire le puzzle de ses racines. (…) Avec une distanciation étonnante, un humour improbable, des mises en abîme tchékhoviennes et des balises historiques et littéraires fascinantes. (…) Le choc des cultures était inévitable entre cette famille italienne et l’homme arabe qui allait devenir son père au cœur des troubles de l’indépendance tunisienne. Le soir, Catherine Makereel

Distribution

Avec Myriam Saduis et Pierre Verplancken - Collaboration à la mise en scène : Isabelle Pousseur - Conseillers artistiques : Magali Pinglaut et Jean-Baptiste Delcourt - Lumières : Nicolas Marty - Création vidéo : Joachim Thôme - Création sonore : Jean-Luc Plouvier - Ingénieur son et régisseur vidéo : Florent Arsac - Mouvement : Nancy Naous - Costumes : Leila Boukhalfa

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Mardi 20 novembre 2018, par Didier Béclard

Une famille prise dans le flux de l’histoire

Dans le cadre du festival « Mouvements d’identité » au Théâtre Océan Nord, Myriam Saduis remonte sur scène dans « Final Cut » où elle raconte son histoire, sa recherche de ses racines, de son identité, sur fond de décolonisation apparente mais non réelle. C’est beau, poignant, bouleversant.

Sur le plateau, juste un bureau avec de multiples tiroirs foisonnant de secrets, de richesses, et une chaise. Myriam Saduis s’avance, s’assied, explique qu’au décès de sa mère elle a découvert une enveloppe contenant des lettres de son père qui étaient adressées et dont elle n’avait jamais eu connaissance. Sur l’enveloppe, une indication sibylline : « père de Myriam ». Cette découverte a pour elle un effet de « fracas de foudre ».

Née en France de mère d’origine italienne installée depuis trois générations en Tunisie, alors protectorat français, et de père arabe, un indigène, un bougnoule, un bicot, pour la famille de sa mère, Elle n’a quasi pas connu son père. Ses parents divorcent lorsqu’elle a trois ans et sa mère lui a toujours interdit de revoir son géniteur allant même jusqu’à le faire expulser de France sous le prétexte fallacieux du risque d’enlèvement de l’enfant. Sa mère change le nom de son père, Myriam Saâdaoui devient Myriam Saduis s’appuyant sur une loi française de 1972, qui dit qu’il est « légitime » de « franciser un nom à consonance étrangère pour une meilleure intégration ». Et puis, elle fait l’objet d’une sorte d’exfiltration, on la place chez ses tantes, et sa mère lui assène « tout est réglé ».

Dès ses cinq ans, dès qu’elle sait lire, elle cherche à retrouver la trace de son père, en vain. Elle le loupe à cinq minutes près, lorsqu’elle a seize ans, et qu’il est passé à la maison, ce qui poussera sa mère à le faire expulser. A la minute même où Myriam Saduis devient majeure, elle quitte la maison. Sa mère perd la raison, arrive au cœur des ténèbres et part dans un délire paranoïaque dont elle ne sera libérée que par la mort dans un hôpital psychiatrique.
Le festival « Mouvements d’identité » organisé par Isabelle Pousseur, directrice du Théâtre Océan Nord présente trois spectacles, indépendants les uns des autres, trois récits de femme singulier, lié à un ou plusieurs endroits du monde (Tunisie, Burkina Faso, Niger) mais aussi à un moment de l’histoire. « L’histoire de mes parents croise l’histoire du monde », explique Myriam Saduis, la colonisation puis l’indépendance de la Tunisie obtenue en 1956 a en effet obligé la jeune famille à retourner en France. Et son récit touche à l’universel, « les histoires subjectives font l’histoire », dit-elle.

Formée à l’Insas, en section jeu, Myriam Saduis se consacre depuis une dizaine d’années à l’écriture et à la mise en scène notamment de « La Nostalgie de l’Avenir » d’après « La Mouette » de Tchekhov ou le magnifique « Amor Mundi » d’après Hannah Arendt. Ici, elle plonge dans cette équation à une inconnue, une confidence intime, sincère, douloureuse par moment, qu’elle porte majestueusement. Épaulée par l’acteur Pierre Verplancken qui incarne notamment sa mère sous les traits d’Arkadina dans « La Mouette » - « aucune femme ne peut jouer ma mère, sauf Isabelle Adjani », affirme l’actrice -, elle invite des auteurs comme Marguerite Duras, mais aussi la danse, des images d’archives, et la chanson avec Barbara ou « Les parapluies de Cherbourg » de Jacques Demy. Le film qui raconte l’histoire de Geneviève qui veut épouser Guy, sur fond de guerre d’Algérie l’a marquée lorsqu’elle avait dix ans : « j’ai senti confusément ma propre histoire, dont je ne savais pourtant rien », dit-elle.
Myriam Saduis se dévoile littéralement dans ce spectacle où elle fait montre de ses talents d’auteure (on le savait déjà), de comédienne et, plus surprenant, de chanteuse.

Théâtre des 4 Mains.